Je suis infirmière autorisée et j’ai toujours travaillé en chirurgie, à l’exception d’une période de cinq ans durant laquelle j’étais infirmière en milieu communautaire. Au fil des ans, j’ai travaillé avec bon nombre de patients atteints du cancer et j’ai souvent participé à leur traitement et à leurs soins à différentes étapes de la maladie.
Au mois de février 2011, je suis allée voir un dermatologue au sujet d’un grain de beauté sur mon abdomen qui avait changé de forme en l’espace de quelques semaines. J’avais ce grain de beauté depuis longtemps et il avait toujours été de forme irrégulière. Le médecin m’a dit qu’il s’agissait probablement d’un mélanome. Je m’en doutais, mais j’espérais avoir tort.
J’ai consulté une chirurgienne plasticienne le jour même. Elle a enlevé le grain de beauté sur-le-champ et m’a dit qu’il faudrait attendre une semaine pour les résultats. Le lundi suivant, elle a confirmé qu’il s’agissait bel et bien d’un mélanome malin. J’ai mis un certain temps à intérioriser ces mots. La docteure m’a aussi dit que les marges obtenues n’étaient pas suffisamment claires et que j’allais devoir subir une autre opération. C’est à ce moment-là que j’ai ressenti l’état de choc qui accompagne ce genre de nouvelle. Le 14 avril 2011, j’ai subi une deuxième opération et une biopsie des ganglions sentinelles à l’Hôpital Princess Margaret. Deux semaines plus tard, le chirurgien m’a annoncé que j’étais atteinte d’un mélanome de stade IV, mais que les ganglions sentinelles, eux, n’étaient pas atteints. Je n’en revenais pas! Ces résultats étaient très positifs.
Je riais et je pleurais simultanément. Je n’aurais pas pu souhaiter de meilleures nouvelles.
J’avais beaucoup de soutien de ma famille et de mes amis. Les gens me disaient parfois que j’étais chanceuse d’être infirmière, car je savais tout au sujet de cette maladie. Effectivement, je connaissais la partie physique de la maladie, mais l’aspect psychologique était tout à fait nouveau pour moi. J’ignorais l’effet dévastateur des mots « vous avez un cancer ». Je crois qu’il est beaucoup plus difficile de composer avec cet aspect de la maladie qu’avec la maladie physique. J’ai rencontré l’oncologue sans tarder. Nous avons parlé du traitement à l’interféron et j’ai décidé que je n’irais pas dans cette voix, car dans mon cas, les statistiques n’étaient pas suffisamment positives.
Au mois de mai, j’ai commencé à me sentir déprimée sans savoir pourquoi, puisque j’étais contente des résultats reçus. Je me posais continuellement les mêmes questions : « Pourquoi ont-ils fait un si gros prélèvement? Ont-ils réussi à enlever tout le cancer? » Cette maladie m’a aussi obligée à réfléchir à la mort. Je suis allée à Wellspring et j’ai rencontré Annette Cyr, le membre du groupe de soutien par les pairs qui allait travailler avec moi. Ayant suivi ce cheminement avant moi, Annette m’a beaucoup aidée. Je me suis aussi inscrite au programme Healing Journey, offert par Wellspring, en vue d’obtenir de l’aide pour mieux composer avec mon diagnostic. J’ai eu beaucoup de conversations avec mes proches, dont une amie qui avait elle-même eu un cancer. Vers la mi-août, j’en avais assez. Je voulais en finir avec tout cela et me sentir mieux. Je me suis donc penchée sur ce qui me gênait. Je me suis vite rendue compte que la plupart des choses qui me préoccupaient étaient des aspects sur lesquels je n’avais aucun contrôle. Je me sentais bien et je pensais être guérie.
Je me disais : « Si je me trompe, c’est comme ça et je composerai avec la suite au moment venu ».
Pour l’instant, c’est ma vie et je vais tenter de la vivre du mieux que je peux. J’ai une famille formidable et de bons amis, de même que deux magnifiques petits-fils qui sont tout pour moi. Je fais des efforts pour vivre l’instant présent et apprécier les nombreux bienfaits dont je suis comblée. La prière a toujours été une importante partie de ma vie et elle l’est encore aujourd’hui.
Voici l’analogie que j’utilisais pour aider les gens à mieux comprendre comment je me sentais. À partir du moment où j’ai reçu le diagnostic, jusqu’au moment où j’ai subi l’opération, j’ai essayé de ne pas penser à toutes les possibilités qui m’attendaient. J’avais l’impression de marcher autour d’un trou sans jamais le perdre de vue par peur de tomber dedans. Dès que j’ai appris que mes ganglions sentinelles n’étaient pas atteints, j’ai succombé à toutes les émotions que j’avais réussi à étouffer jusque-là. J’ai perdu de vue le trou et je m’y suis engouffrée. J’ai mis du temps à en sortir, mais j’y suis arrivée et je ne m’en suis plus rapprochée depuis. Je vis encore des moments difficiles, mais grâce à mon réseau de soutien, je tiens le coup. Jusqu’à présent, je m’en tire bien.